L'autre jour, au 13h sur la 2, je tombe sur un reportage sur le bal de fin d'année des étudiants de Polytechnique. Enfin, quand je dis bal de fin d'année, c'est bien pour me moquer, parce que le bal des élèves de polytechnique est une chose très sérieuse (comme tout ce qu'ils font j'imagine), une "étape essentielle de leur formation" selon la journaliste. Jugez plutôt, des mois de préparation pour danser le jour J un quadrille parfait devant tout le gratin du pays. Si je parle de ça, ce n'est pas du tout que j'envisage d'intégrer polytechnique (quoique vu le peu de réactions qu'a suscité mon passage à Star Académy, je pense sérieusement à me reconvertir) ; non, c'est simplement qu'en les voyant défiler fièrement en tenue de soirée sous l'oeil inquiet de leurs professeurs, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à nous autres, les pauvres étudiants en musicologie, en train de défiler fièrement en tenue de soirée sous l'oeil inquiet... de Julien, notre chef de choeur, lors des concerts de chorale.
Et alors, me direz vous, quel rapport? Et surtout, comment oser comparer LE bal de Polytechnique avec un vulgaire concert de chorale? Alors primo, on dit "choeur", pas "chorale". Parce que chorale, ça fait bande de gamins braillards ou alors troisième âge, au choix. Alors que choeur, c'est beaucoup plus noble, ça fait sérieux, professionnel, et puis dans choeur, il y a coeur et même coeurs, il y a "chanter d'un seul c(h)oeur". Rien à voir. Pour ce qui est du rapport, je ne sais pas vraiment comment l'expliquer, mêmes sourires tendus, même fierté, même envie de bien faire, même tenue soignée, même plaisir, et puis surtout même applaudissements d'un public conquis, et même parents applaudissant fièrement leur progénitures en brandissant leurs appareils photo (quoique je ne sais pas si c'est autorisé les appareils photos à Polytechnique). Et puis bon, j'avoue, je cherchais surtout un prétexte pour vous raconter le concert d'avant-hier. Parce que mine de rien, c'est une sacré aventure, les concerts du choeur (sacrée puisque l'on chante une messe, évidemment).
Donc vendredi dernier, concert du choeur des étudiants en musicologie à la Grand'Eglise de Saint-Etienne. D'ailleurs, soit dit en passant, je n'ai pas vraiment compris ce qu'elle avait de grand cette église, à part peut-être l'état de délabrement de ses arrières (voir plus loin). Arrivée sur place vers 18h, panique à bord, c'est l'heure du raccord, ce qui est toujours un moment assez bordélique. Déjà, il faut se placer dans le choeur et sur les estrades. Quand il manque la moitié des choristes, c'est assez compliqué. (Donc le trou au premier rang c'est pour Astrid? Mais non mais on lui a déjà réservé une place au troisième. Et machin on lui a pas gardé de place? Au secours!). Résultat au final, on retrouve toujours les grands au premier rang et les petits au dernier. Mais au moins, on aura essayé. Puis branle-bas de combat, on veut faire des photos pour le journal... sauf qu'il faudrait peut-être avant enlever les manteaux et écharpes colorés qu'on a enfilés par dessus nos robes noires (parce que c'est pas tout ça mais qu'est-ce qu'il fait froid dans les églises!). Ensuite, on peut enfin passer à l'échauffement vocal. Quelques oui-oui-oui-la-la-la plus tard, on libère la place pour que l'orchestre puisse s'accorder. Les problèmes de placement n'étant toujours pas résolus, Julien nous entraîne dans les souterrains glauques de l'église à la recherche d'un espace où on puisse disposer les quelques 80 choristes. On y croise quelques rats, des drôles de statues, et on débouche dans une cour intérieure sordide demeurée intacte depuis un siècle (intacte dans son état de délabrement). Drôle d'endroit pour s'échauffer... Quelques recommandations plus tard, quartier libre jusqu'au concert. On en profite pour aller manger un bout : Chloé a apporté ses petits Lu, Aurélie sa salade Bio, Romain son saucisson, bref à chacun sa spécialité. Puis sous l'approbation générale, nous allons prendre d'assaut un bar pour commander une tournée générale... de chocolat chaud. Le barman a gagné sa soirée!
21h : retour à l'église. Après avoir repéré les parents venus encourager leur progéniture, nous allons nous poser dans un coin de la sacristie le temps de la première partie. Assis par terre dans la poussière en jupe noire c'est moyen, mais vu qu'il n'y a pas de sièges... On joue au pendu avec de drôles de mots (Bouckourechliev, Stochkausen...) pour passer le temps. Une heure plus tard, le grand moment est arrivé. Petit échauffement express, dernières recommandations... et c'est parti. Premier objectif : aller se placer dans le choeur le plus dignement possible. Chose difficile quand il faut commencer par escalader les estrades en jupe. Mais par miracle, tout le monde se positionne dans le calme. L'orchestre s'accorde, Julien respire, et la messe de Mozart est lancée. 1h de musique alternant pièces pour choeur et solos. Il faut savoir que l'on a un peu réécrit le texte de la messe : Gloria est devenu Klorio, Kyrie Eleison est devenu Pottier Electronique, les vocalises sur a-a-a-a-a-a-a-a-men tra-la-la-la-la-la-lère... Mais personne ne s'est rendu compte de rien, heureusement. Bref, tout se passe bien, et quand la dernière note s'achève, c'est un grand silence qui s'abat sur la salle... car personne n'ose applaudir (il faut savoir qu'en musique classique, c'est très mal vu d'applaudir entre les mouvements d'une oeuvre). Nous avons donc été vraiment très nuls?! Mais non, ouf, quand le public réalise que c'est vraiment fini, les applaudissements éclatent enfin. C'est même une standing ovation qui nous est réservée (sauf pour les deux premiers rangs du public, constitués exclusivement par nos professeurs. Un peu de retenue tout de même). C'est parti pour les saluts : les solistes, le choeur + l'orchestre, re-les solistes, re-le choeur... On apporte des fleurs aux solistes qui cette semaine ont évité de se sauver juste à ce moment là, car la semaine dernière ceux qui apportaient les fleurs avaient dû vivre un grand moment de solitude. Et évidemment, on va rechanter des bis, parce qu'on peut vraiment pas les laisser comme ça! Alors en principe, on prévoit d'avance ce qu'on va chanter (en l'occurrence, Credo puis Gloria). Mais Julien en a décidé autrement : ce sera donc d'abord le Gloria. Quelques applaudissements plus tard, c'est donc logiquement l'heure de chanter le Credo. Ah mais non, on me fait signe que Julien a changé d'avis, ce serait le Cum Sancto Spiritu et pas le Gloria. Vous êtes sûrs? Mais oui, c'est le Cum Sancto! Au secours, Julien donne le départ... et ce qui devait arriver arriva : quelques distraits attaquent FF le magnifique premier accord du Credo... au lien de l'unisson attendu pour le Cum Sancto. Les aléas du direct, aurait dit un animateur télé. En attendant, c'est au milieu des rires que l'on arrive tant bien que mal (plus mal que bien) à la fin du Cum Sancto. Et on est enfin autorisés à sortir, dans le calme s'il vous plaît...
De retour dans la sacristie, on refait le match. C'était bien non? Moi j'ai préféré la semaine dernière. Et dans le Credo on était pas décalés à un moment? Et bla bla bla et bla bla bla. Il est preque minuit, mais on sentira la fatigue plus tard. Quant à moi, je file me coucher, parce qu'en ayant cours à 8h le lendemain matin, ça serait bien de dormir un peu! N'empêche, quand j'y pense... j'échangerais pas ma place contre tous les quadrilles du monde!